Nous sommes arrivés à un moment de notre histoire où nous avons terriblement besoin de trouver un langage et une méthodologie qui nous sortent de la culture dominante. Une culture qui repose sur la richesse, les ambitions et la sécurité des personnes peut sembler vide de sens dans de nombreux milieux. Par extension, nous avons un travail à accomplir avec la mise à jour de nos systèmes de mesure. Pour faire simple, les valeurs qui façonnent l’architecture et qui agissent sur le corps sont différentes en fonction du lieu où l’on se trouve, mais nous souhaitons examiner avec humilité ce que nous pensons de nous-mêmes, de la tête aux pieds, d’une main jusqu’à l’autre. La mondialisation, comme le modernisme, suggère que nous sommes qualitativement les mêmes en tant que consommateurs mais que nous sommes différents en tant que producteurs. Il s’agit d’une inégalité. En tant que designers, nous aimerions pouvoir nous rendre hommage ensemble. En toute chose, il y a une phase de démontage, puis une phase de construction puis, à nouveau, une phase de démontage. Nous reconnaissons la précarité et les contraintes tout en conférant une valeur, voire du plaisir, à nos actions, nos objets et nos espaces.

Il faut partir du corps pour terminer par la vie. Tous les programmes, toutes les hypothèses et toutes les normes se situent entre ces deux extrêmes. Notre recherche en atelier ambitionne de rassembler une documentation et de rendre hommage avec une intention. À travers celle-ci nous considérerons que le corps commence par un nettoyage collectif ou sans nettoyage collectif, autrement dit par une action joyeuse au cours de laquelle les décisions sont prises en partant de la création d’un désordre et en évoluant jusqu’à la résolution de ce désordre. Ce processus que nous vivons tous chaque jour et chaque année est semblable à une négociation s’inscrivant à l’intérieur de cycles. Ce faisant, nous nous demanderons quelles sont nos exigences, dans quelle mesure une chose doit être propre, ce qui motive un tel besoin d’ordre et quelles en sont les conséquences. Mary Douglas a écrit dans « Purity and Danger » que « Là où il y a de la saleté, un système existe. La saleté est le produit dérivé d’une mise en ordre et d’une classification systématique de la matière, dans la mesure où la mise en ordre consiste à rejeter les éléments inappropriés... Il s’agit d’une idée relative. » L’idée que nous revenons toujours à un ordre donné est ancrée dans nos actions. Tout ce que nous apprécions est acquis, et nous apprenons ce qui relève de l’imagination en utilisant notre imagination. Notre studio vise à transformer notre vie quotidienne à travers des cycles de célébration et de retrait. La célébration peut être le moment de la préparation d’un sandwich et le retrait, dans ce cas, est le nettoyage de l’assiette. Par extension, nous nous interrogeons sur nos privilèges et sur les codes qui font que nous sommes à l’intérieur ou à l’extérieur, chez nous ou chez les autres, et que nous nous sentons à l’aise ou mal à l’aise.

L’atelier pourra se dérouler sur plusieurs niveaux, mais il sera axé sur le corps. Il pourrait être question de camper à l’intérieur et de vivre à l’extérieur. Cela impliquerait de renoncer à certaines choses et à posséder beaucoup plus que ce dont nous avons besoin. Les projets seront dans tous les cas des architectures qui serviront à former de nouvelles habitudes, de nouvelles responsabilités et qui présenteront de nouveaux risques. Nous allons construire des fours (en premier) et bien sûr, nous cuisinerons.